REGION NORMANDIE – ASSEMBLEE PLENIERE du 24 mars 2016 – Discours de politique générale 🗺

IMG_20160324_110403Groupe NORMANDIE ECOLOGIE – EELV
Séance plénière du jeudi 24 mars 1016
Discours de politique générale – Laetitia Sanchez, Présidente du Groupe Normandie Ecologie – EELV

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les conseillers,

C’est désormais la loi ! Avec la loi Maptam, la Région devient chef de file dans les domaines de l’aménagement durable du territoire, de la biodiversité, du climat, de l’énergie, de l’intermodalité et de la complémentarité entre les modes de transports.

Si la qualité de l’air est de la responsabilité des communes, l’échelle des pollutions – industrielles, agricoles, résidentielles et transports – est bien régionale.

C’est en tant que chef de file, que la région devra notamment engager dès 2016 le chantier d’élaboration du Schéma régional d’aménagement et de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET).

La lutte contre le changement climatique et la transition énergétique sont les priorités majeures des collectivités locales, de l’Etat et de l’Europe (p.104).
Les Plans Climat Energie que nous avons votés, placent en priorités normandes les économies d’énergies, le développement des énergies renouvelables, l’efficacité énergétique des bâtiments et des logements, et le développement de modes de déplacements alternatifs au « tout pétrole ».

« La Région Normandie entend s’inscrire pleinement dans les engagements nationaux de diminution des GES et de lutte contre le changement climatique. » L’objectif indiqué dans le DOB est de diviser par quatre les émissions de GES d’ici 30 ans.

Les Schémas Régionaux du Climat, de l’Air et de l’Energie (SRCAE) arrêtés en 2013, fixent notamment les orientations permettant de prévenir ou de réduire la pollution atmosphérique. Les départements de la Seine-Maritime et de l’Eure font même l’objet de mesures spécifiques à travers un plan de protection de l’atmosphère (PPA), ce territoire étant identifié comme présentant un « risque de contentieux ».
On sait qu’aujourd’hui la France est en contentieux avec l’Europe ; les polluants en cause sont les particules fines, inférieures à 10 microns (PM10) et le dioxyde d’azote (NO2) : l’Europe, d’une part, constate le dépassement de valeurs limites et, d’autre part, que tout n’est pas mis en œuvre pour respecter les valeurs limites.

Selon la présentation du PPA rédigé par la DREAL « naguère essentiellement due aux émissions industrielles, la pollution atmosphérique dépend aujourd’hui d’une multiplicité d’activités (trafic routier, industrie, agriculture, chauffage résidentiel, travaux d’aménagements…) liées de manière étroite et complexe à la structure et à la vitalité du territoire. (…) Au niveau régional, réduire ces émissions suppose l’évolution des modes de transport et de leur usage (réduction des kilomètres parcourus, développement de l’usage de transports moins polluants, développement du transport multi-modal, …) qui nécessite un changement profond de la stratégie de développement territorial, tant d’un point de vue économique que d’un point de vue urbanistique. »

En matière de transports, le PPA préconise les mesures suivantes :
– Instruments financiers visant à limiter l’usage des véhicules à moteur et à réguler le trafic ;
– Développement de l’usage des mobilités douces ;
– Développement de l’usage des transports en commun ;
– Développement du co-voiturage et des Plans de Déplacement d’Entreprise ;
– Mesures réglementaires ;
– Amélioration des systèmes de transport ;
– Amélioration de la fluidité du 
trafic/résorption des points noirs ;
– Stratégies multi-modales pour le transport des marchandises ;
– Programmes incitatifs pour le développement et l’adoption accélérée des véhicules propres.
http://www.normandie.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/synthese_du_PPA_cle211199.pdf

Les crédits inscrits au Contrat de plan Etat Région doivent permettre de développer la mobilité multimodale et la transition écologique et énergétique.

Les fonds européens de développement régional peuvent nous permettre de faire de la Normandie une éco-région attractive, avec une transition industrielle en faveur des énergies renouvelables, le soutien et l’interconnexion des réseaux de transports collectifs et des modes actifs (extension des lignes de tramway, lignes de bus à haut niveau de service, plan vélo régional améliorant les voies de circulation vélo et faisant des gares de véritables pôles d’échanges (adaptation du stationnement, sécurisation des accès, développement des services en gares, tarification adaptée, information et communication)

La préservation des ressources et l’adaptation au changement climatique
La préservation du patrimoine naturel régional
La protection et la restauration du réseau écologique régional
Le traitement des friches urbaines
Iront dans le sens de cette éco-région attractive.

Il est écrit p. 93 du rapport d’Orientations budgétaires que « Préserver les espaces agricoles et naturels en limitant l’étalement urbain et le mitage implique une politique volontariste de revitalisation urbaine, en facilitant notamment la requalification des friches » avec le soutien de l’EPFN (Etablissement Public Foncier de Normandie)
Le FEDER peut également financer ces stratégies de revitalisation urbaine, incluant la mobilité.

Saluons ce qui va dans le bon sens : les mesures agro-environnementales et climatiques (MAEC), le soutien à l’agriculture biologique, ou encore l’approvisionnement en produits locaux des restaurations scolaires à hauteur de 80% – mais nous souhaiterions que la Région anticipe la loi actuellement discutée au Parlement en y incluant 20% de bio, ce qui est bon à la fois pour l’environnement, pour la santé et pour l’emploi agricole,  en permettant de développer des filières biologiques normandes de qualité.

Concernant les contrats de performance énergétique des lycées normands, nous sommes d’accord avec vous lorsque vous écrivez (p.74) que « Les lycées sont à l’origine d’une part importante des émissions dans les bilans Carbone des deux anciennes régions normandes. Et que Le patrimoine régional constitue donc un levier d’action important pour réduire les consommations d’énergie et les émissions de GES. Outre l’impact sur la facture énergétique, cette action sur le patrimoine régional permettra d’accompagner la montée en compétence des entreprises normandes dans les techniques durables et la relance du bâtiment à l’échelle régionale. »

Là où nous divergeons, c’est sur le recours à des partenariats privés, dont on sait que le but est de générer des profits, à partir des économies d’énergie. La société privée gérant tout de A à Z, il est difficile de vérifier :

1/ la pertinence des travaux – on demande à des producteurs d’énergie de devenir des professionnels de l’économie d’énergie, qui réduirait le chiffre d’affaires lié à la production.
2/ La qualité des travaux réalisés
3/ La marge réalisée. Là règne un flou total, qui peut conduire à la captation de la rente énergétique.

La création d’une société publique locale (SPL), dont la collectivité reste gestionnaire, permettrait de compléter et relayer les dispositifs d’intervention existants en matière d’accompagnement à la rénovation énergétique des bâtiments.
Nous aurions le soutien financier de la Banque Publique d’investissement – dont l’une des missions est de soutenir les secteurs d’avenir : la transition écologique et énergétique et les énergies renouvelables.
C’est ce qui se pratique en Allemagne, en Belgique et en Autriche  au travers des « Energy Service Company » (ESCo) ou autres « Sociétés de Services d’Efficacité Énergétique » (SSEE).
C’est aussi ce qui se fait en France : la Région Île- de-France avec « Energies POSITIF », la région Rhône-Alpes ont initié ces dernières années des projets de sociétés similaires 100% publique (de type Société Publique Locale) ou publique-privée à dominante publique (de type Société d’Economie Mixte).
En plus d’accompagner la transition énergétique, elles permettent, par leurs interventions propres, et aussi par leur « effet démonstrateur » auprès des maîtres d’ouvrages et des acteurs de marché de la performance énergétique, d’accélérer le rythme d’exploitation des gisements d’économie d’énergie et d’énergies renouvelables des territoires.
L’offre de ces sociétés consiste à :
- Définir au niveau d’un bâtiment un programme de travaux optimal ;
– S’engager sur un niveau de performance ou d’économie d’énergie minimal (de l’ordre de 40% a minima) ;
– Préfinancer tout ou partie de l’investissement ;
– Se rembourser sur les économies d’énergie générées au moyen d’une charge de tiers-financement facturée au maître d’ouvrage (collectivité, bailleur social, copropriété) et dont le montant devra être égal ou inférieur au montant des économies sur la facture énergétique du bénéficiaire.
Grâce à un portage public fort (de type SPL ou Sem) ces sociétés peuvent pré-financer des opérations de rénovation énergétique lourdes et coûteuses (de type rénovation « BBC) ayant des temps de retour longs (de 15 à 25 ans), ce que la logique de marché pure ne permet pas encore.
Vis-à-vis des maîtres d’ouvrage, la SPL a vocation à porter l’engagement de compétence technique, juridique et financière.
A cet effet, le soutien de la Banque Publique d’Investissement constitue une opportunité.
Le caractère public de la BPI lui permet de différencier ses investissements de ceux du secteur privé, en privilégiant des investissements de long terme, à rentabilité moindre mais qui correspondent à la satisfaction de l’intérêt général et à la mise en œuvre de la transition énergétique aux objectifs ambitieux qui sont mis en avant par la Région.

Le seul coût pour la Région c’est la garantie d’emprunt. Ce n’est pas une activité à risque : donc ce n’est pas une question financière de passer par un système privé !
Notre position est pragmatique : en matière d’énergie, il est TRÈS important d’avoir une approche intégrée sous contrôle public, pour éviter les dérives (certains projets s’amortissent en moins de dix ans, d’autres à plus de 35 ans …)

Concernant les énergies renouvelables, nous voterons pour les nouveaux projets qui permettent la transition vers une énergie propre et la sortie du nucléaire – qui ruine les contribuables et fait peser une menace inacceptable sur la sûreté et la santé des Normands.
Là encore nous préférons les projets portés localement par des Sociétés Publiques, à l’exemple de la SPL Ouest Normandie Energies Marines (ONEM) créée en 2012 en Basse-Normandie, avec la Région, le département de la Manche et la Communauté urbaine de Cherbourg.
Sa mission est de favoriser la naissance et l’implantation de projets sur le territoire, et d’accompagner le développement et la structuration de la filière (p.129). C’est la SPL ONEM qui a fédéré l’ensemble des acteurs concernés par les EMR en Basse-Normandie.

Concernant la mobilité et l’intermodalité, nous soutenons les orientations de la Région en faveur des transports collectifs : tramways, lignes en site propres, BHNS, les cars, lorsqu’il n’entrent pas en compétition avec le transport ferroviaire, et permettent d’assurer le transport sur des lignes non ou peu desservies et le rabattement vers des hubs moins nombreux, qui seront mieux desservis, et donc plus efficaces.
Nous soutenons l’amélioration des interconnexions Trains-bus-vélo, avec un développement de la charte Vélo-Région à l’échelle de toute la Normandie.

Là où nous avons des inquiétudes, c’est sur ce que recouvre la notion de « multimodalité » liée au fleuve, qui n’est souvent en réalité qu’un développement du fret camion et des plateformes logistiques : je les vois peu à peu grignoter les terres arables et les espaces naturels sur le territoire Seine-Eure où je vis, et qui par le biais du pôle métropolitain devient peu à peu un réservoir foncier pour la métropole.
La Seine n’est pas qu’un axe tracé à la règle, c’est d’abord un fleuve vivant, un couloir de migrations, des terrasses alluviales, des coteaux à la biodiversité unique. L’exploitation des carrières de granulats pour fabriquer le béton du Grand Paris mite peu à peu les paysages – et seront bientôt remblayés par les déchets des BTP de ce même grand Paris ! Un peu plus loin, les Ecoparcs I, II, III, IV mangent les champs pour accueillir des plateformes de camions. Enfin, le développement des flux liés au contrat de plan interrégional Vallée de Seine nous promet surtout là encore plus de camions et un grignotage du foncier normand. Rajoutez là dessus une nouvelle autoroute, et une nouvelle péri-urbanisation, et vous aurez perdu des milliers d’hectares de terres, et des paysages uniques du patrimoine naturel et culturel normand, des boucles de Seine, ou encore la colline des 2 Amants, connue depuis le Lais de Marie de France au XIIème siècle.

Ce mitage va à l’encontre des préconisations sur l’étalement urbain.

Nous soutenons en revanche l’inscription de l’aménagement des accès définitifs du Pont Flaubert rive gauche et rive droite de Rouen, qui permettront d’achever la liaison A28-A13 par l’Ouest.

Là où nous avons d’autres inquiétudes, et des oppositions, c’est sur le sujet de la reprise de la gestion des TER par la région Normandie, et sur le sujet des aéroports normands.

Vous le rappelez dans le rapport n°10, la France est le pays d’Europe qui compte le plus grand nombre d’aéroports. La Région devient aujourd’hui chef de file en matière de lutte contre le réchauffement climatique. Comment soutenir dans ces conditions le maintien et l’activité de 5 aéroports sur le territoire normand ? Le modèle low-cost qui se généralise, comme vous le soulignez dans le rapport, est ruineux sur le plan social et environnemental. La région doit imposer des critères cohérents avec la responsabilité qui est la sienne comme chef de file pour la préservation du climat. Encourager l’étalement aéroportuaire et le développement d’un modèle ruineux sur les plans environnementaux et sociaux n’est pas une manière responsable de conduire la transition énergétique. Il faut moins d’aéroports, mais des aéroports mieux desservis.
Conserver un aérodrome à Boos pour les transports d’organes du CHU ou les planeurs peut avoir un sens, mais sans continuer à soutenir sur fonds publics des lignes commerciales déficitaires et en déclin.

Notre position d’écologistes est plus délicate sur le sujet des trains. Nous soutenons bien entendu tous les projets qui vont dans le sens d’une amélioration des trains du quotidien. De meilleures correspondances, des tarifs acceptables, une amplitude pour tous les usages, de 6h du matin à minuit, avec un cadencement régulier, voilà les services que les usagers du train attendent. Avec un nombre suffisant de rames bien entretenues, pour accueillir tous les voyageurs assis.
Pour cela, il faut des moyens. C’est pourquoi nous sommes très inquiets de la façon dont vous avez décidé de reprendre l’intégralité de la gestion des trains intercités, sans négociation de compensations.
Le coût budgétaire de cette opération reste très incertain.
Comment négocierez-vous, à présent que vous avez offert vous-même cette reprise. Comment négociez-vous la compensation pour la moitié de voyageurs d’Ile de France que les intercités désormais normands transporteront sur la ligne Paris-Le Havre ?
Comment négocierez-vous avec le STIF, le syndicat d’Ile de France, maintenant que vous avez proposé le marché ?
L’incertitude financière qui règne risque d’avoir de lourdes conséquences sur l’avenir du train en Normandie : quand réaliserons-nous les travaux de doublement du Mantois, qui est la priorité pour la ligne Paris – le Havre ? Comment sera financée la nouvelle gare de Rouen ?
Si cette première phase de travaux ne devait jamais se réaliser, ce qui est envisageable, qu’en sera-t-il de la dette de l’Etat vis-à-vis de la région ?
Quel avenir pour les trains TET Paris – Granville et Caen – Tours ?
Quelle réflexion concernant la liaison inter régionale Rouen – Amiens ? Et pour ce qui concerne les services intra régionaux, quels moyens resteront disponibles pour l’amélioration de la liaison Caen – Rouen, symbole de la réunification normande ? Ou la réouverture de la ligne ligne Rouen-Evreux ?
Pour nous écologistes, « faire préférer le train » au plus grand nombre, c’est mettre en œuvre pour les usagers les améliorations décisives qu’ils attendent :
Un cadencement régulier et sans creux, de 6h du matin à minuit, à l’instar du modèle suisse, l’un des plus performants ;
Des correspondances efficaces : si la région devient Autorité organisatrice de tous les transports terrestres (trains, cars…), ce point peut rapidement se voir amélioré ;
Des tarifs lisibles et incitatifs, avec une politique d’abonnements à la hauteur.
Pour pouvoir « espérer qu’avant 2020, la Normandie ait enfin des conditions de transport dignes de ce nom« , il faudra que le service aux usagers soit enfin la priorité de la région ! Cadencement, Amplitude, Correspondances, Tarifs, en seront les sésames.

Enfin (pour finir), comment parler du train sans parler du fret ?
Un train, c’est cinquante camions de moins sur la route. Nous allons moderniser la ligne Serqueux-Gisors, avec la volonté régionale affirmée de reporter le trafic routier sur le réseau ferré et le fluvial, pour moins de pollution.
Qu’en est-il de la continuation de la ligne Serqueux – le Havre, pour desservir le port du Havre ? Moins cinquante camions par train, autant de GES et de pollution en moins, et une véritable opportunité de concurrencer les ports du Nord de l’Europe, qui gagnent en continuant de miser sur le ferroviaire et le fluvial.
Alors que dans tous les pays européens la part du fret ferroviaire est en augmentation, 43% en 10 ans en Allemagne !, le fret ferroviaire français a baissé quant à lui de 40%, et sa part modale dans le transport n’est plus que de 10%.
Fret ferroviaire et fret fluvial sont à la fois une solution pour désengorger la route, supprimer des émissions de GES et de la pollution atmosphérique. Ils sont aussi une possibilité réelle de faire du Havre un grand port européen concurrentiel avec Rotterdam, Anvers ou Hambourg.
Ce n’est pas le tout de le souhaiter, il faut maintenant le faire.

L’intervention en vidéo (entre 21′ et 31′) : rdB5taT5UaQ

 

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Un commentaire pour “REGION NORMANDIE – ASSEMBLEE PLENIERE du 24 mars 2016 – Discours de politique générale 🗺”

  1. Une vision claire et précise pour construire un avenir régional innovant.

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